L’architecte de Johannesburg Anthony Orelowitz a conçu une maison familiale qui réinvente la notion de refuge urbain.
« À Johannesburg, il n’y a pas la montagne », explique l’architecte Anthony Orelowitz…. « Il n’y a pas non plus la mer. » Il fait référence à la Table Mountain du Cap, en Afrique du Sud. Les maisons de Cape Town sont généralement tournées vers l’extérieur, pour avoir une vue sur l’océan ou sur la Table Mountain.
« Ici, vous devez créer votre propre environnement”, explique Anthony.
Il a voulu s’adapter au caractère urbain de Johannesburg lorsqu’il a conçu sa propre maison dans les célèbres banlieues boisées de la ville. Anthony est avant tout architecte commercial. Son cabinet, Paragon, est responsable de certains des projets les plus importants de la ville. Mais, dit-il, « Je n’avais pas fait de maison depuis près de 15 ans ».
Néanmoins, travaillant en étroite collaboration avec l’architecte Elliot Marsden et la décoratrice d’intérieur Julia Day, il a conçu une maison à Joburg, à la fois parfaitement adaptée à la ville et tout à fait différente des maisons voisines.
Le terrain sur lequel Anthony a construit sa maison était auparavant un court de tennis : on y accédait par une longue allée entourée de maisons de tous côtés.
Julia a été impliquée dès le début du projet, de sorte que les idées qui ont motivé la conception ont été maintenues jusque dans les moindres détails. Elle affirme que la réalisation de cette maison ne ressemble à aucune autre sur laquelle elle avait travaillé auparavant. « Partout, les détails ont été personnalisés au fur et à mesure », dit-elle. (Elle se souvient avoir redessiné des salles de bains entières pour que la disposition du carrelage soit parfaitement régulière, s’alignant exactement avec les portes, sans qu’il soit nécessaire de couper ou d’utiliser des carreaux de taille inégale). La conception, l’ingénierie, la construction et la décoration ont été une expérience en perpétuelle évolution.
Pour sa maison, Anthony s’est tourné vers l’archétype de la maison atrium : une cour intérieure entourée de tous côtés par la batisse, créant en son cœur un sanctuaire paisible, ouvert sur le ciel. Il la qualifie de véritable oasis dans la ville ».
La maison est essentiellement constituée d’une série de pavillons, avec de vastes portes coulissantes et des écrans qui peuvent être ouverts ou fermés, reconfigurant une mosaïque d’espaces d’innombrables façons. (Un nouveau système de rails a dû être conçu pour actionner les panneaux de verre massifs des portes coulissantes).
Cependant, plutôt que de simplement entourer la cour centrale, Anthony a « poussé » le paysage à l’intérieur des pavillons et jusqu’aux limites du site. « Le sol à l’intérieur est d’un seul tenant d’un bout à l’autre de la maison », explique-t-il.
Cela crée, des « cours secondaires » tout autour de la maison, où les pavillons s’ouvrent sur des espaces privés et paisibles sous les arbres, et où les murs de clôture deviennent en fait les murs de la maison.
L’architecte et propriétaire Anthony Orelowitz et l’architecte d’intérieur Julia Day.
Malgré son aspect long et bas, la maison a également un niveau supérieur dans la cime des arbres, soigneusement conçu autour des branches qui se penchent dans et sur la maison. C’est comme une « grande cabane dans les arbres pour adultes », explique Anthony. Cela donne un sentiment d’espace tricoté tant verticalement qu’horizontalement, vous attirant vers les terrasses autant que vers la maison et les jardins en rez-de-chaussée.
Anthony a conçu la maison « à l’envers », avec les chambres au rez-de-chaussée, nichées sous les arbres, et les espaces de vie et de détente extérieurs (y-compris la piscine, dont les hublots au fond donnent sur la cour centrale) au niveau supérieur. Il dit que lorsqu’il se réveille le matin, il veut « toucher le sol » et « être dans la forêt ».
La luminosité et l’apparente simplicité de la conception sont véritablement une merveille d’ingénierie, allant des massives et solides « poutres de tension des poteaux » qui enveloppent la maison (si bien cachées par les plantes en cascade qu’on ne peut les voir) à un plancher de salon flottant suspendu par un cintre en acier de 90 mm au plafond au-dessus duquel il semble défier la gravité.
Julia explique que la palette soigneusement contrôlée de finitions intérieures a été sélectionnée pour ses aspects naturels, tactiles et bruts. Anthony parle d’un « retour sensoriel » lorsqu’on touche les surfaces de la maison, des murs aux sols. C’est une qualité qu’il trouve régénérente. La sensualité brute de la pierre, la luxuriance des plantes et la présence d’éléments tels que l’air et l’eau s’éloignent du modernisme minimaliste européen pour se tourner vers une sensorialité luxuriante et tropicale typiquement brésilienne.
Les matériaux tactiles et naturels amènent la nature à l’intérieur et cette « sensation » est renforcée par la façon dont la lumière pénètre dans la maison, la façon dont l’air circule au-dessus d’un étang et à travers un puits de lumière, le mouvement et les variations de température…
Un soin tout particulier a été apporté aux détails afin qu’il n’y ait pas de transition entre l’intérieur et l’extérieur, but très souvent recherché mais rarement atteint. Un revêtements en lames de bois habille les murs et les plafonds et les cadres des portes et des fenêtres sont intégrés avec une telle précision que les seuils sont imperceptibles. L’éclairage (également très personnalisé) est dissimulé et conçu de manière à ce que, le soir et la nuit, la qualité de la lumière à l’intérieur et à l’extérieur soit la même. L’effet en est magique.
Malgré la beauté épurée de son design, Anthony compare sa maison à l’école Poudlard de la série de livres Harry Potter, faisant référence aux passages secrets et aux escaliers dérobés de cette école imaginaire. Il la décrit davantage comme un système que comme une structure fixe. “Il y a des passages cachés et d’autres espaces dissimulés derrière ces espaces », explique-t-il.
La façon dont les murs et les écrans peuvent être ouverts ou fermés dans la maison d’Anthony permet de la reconfigurer comme par magie. Elle est toujours en train de se déplacer et de changer de forme. « C’est assez théâtral », reconnait Anthony.
Certaines caractéristiques totalement exagérées, comme le puits de lumière automatisé contrôlé par une application (environ 20 m de long et 3 m de large) qui s’étend sur toute la longueur de la façade de la maison, ajoutent à l’effet magique, transformant les intérieurs en extérieurs. « Les murs sont faits de plantes », souligne Anthony, faisant référence à un jardin vertical qui occupe toute la longueur du premier étage.
Julia a maintenu ce sentiment de surprise et de découverte dans tout l’intérieur, en particulier en dissimulant les armoires et les espaces de rangement derrière des panneaux muraux et même des pièces entières (les vestiaires et l’arrière-cuisine sont dissimulés derrière des panneaux muraux sans joints). Cela a pour effet de ramener la maison à une échelle humaine et confortable.
Aux yeux de tous, Julia a fait des miracles pour s’assurer que toutes les extérieurs et les connexions soient réellement habitables, et que la famille occupe tous les espaces de vie. Elle explique que les grands volumes et les espaces ouverts et fluides ont également besoin de « modules » et de « de coins reposants » qui créent des espaces plus intimes. Pour qu’ils soient reposants, les espaces ouverts doivent être des espaces où les gens peuvent « être seuls ensemble ».
Elle a donc veillé, tout en respectant l’architecture dans le choix de son mobilier à ce que la maison soit aussi chaleureuse, accueillante et apaisante qu’elle est surprenante et délicieuse.
Elle s’est largement inspirée des créations de De Padova et de marques comme Ligne Roset, Wiener GTV Design et de designers locaux comme Haldane Martin. Elle souligne que non seulement les meubles sont beaux individuellement, mais qu’ils s’associent à merveille sans se « concurrencer ». Elle a privilégié des designs bas, souvent légers, des pièces assez transparentes qui n’interrompent pas les lignes de vue ou ne « cassent » pas les vues pour donner un sentiment d’espace fluide et continu. « Il n’y a rien qui stoppe le regard », souligne-t-elle.
Mais elle a aussi choisi des créations assez imposantes pour occuper l’espace. « La maison autorise des éléments sculpturaux », dit-elle. Les formes architecturales du mobilier d’extérieur de Haldane Martin, par exemple, ont transporté le langage de la « coque dure » de la maison dans une autre dimension. Mais ce qui est peut-être plus important encore, souligne-t-elle, c’est qu’elle a réfléchi très attentivement à la qualité de l’espace que les meubles individuels créent autour d’eux, afin que les meubles fonctionnent de concert avec le mouvement et les connexions architecturales soigneusement chorégraphiés.
L’espace étant fortement interconnecté, elle a dû constamment réfléchir à ce que les meubles « traduiraient » dans la maison selon les différents points de vue. Dans le même ordre d’idées, elle s’est tenue à l’écart des conceptions « trop fonctionnelles ». La cuisine a été davantage conçue comme un espace convivial où l’on peut cuisiner et recevoir, plutôt que comme une cuisine traditionnelle.
Les intérieurs, souligne-t-elle, sont un exercice de superposition, d’articulation et de complément de l’architecture plutôt que de décoration. Les textures naturelles sont reprises dans les tissus, ce qui maintient le sentiment d’une matérialité ancrée et authentique. Les couleurs sont tirées de l’eau, du feuillage, du ciel et de la pierre pour « faire l’intérieur et de l’extérieur un seul espace ».
Pour maintenir la notion de simplicité, de subtiles variations dans la texture des couleurs et les matériaux (le même granit martelé ici, mais sablé là) empêchent l’ensemble de paraître monotone ou stérile. Elle s’est tournée vers l’artisanat, le tactile et l’imparfait pour apporter chaleur et convivialité à l’espace.
Elle est même allée parfois jusqu’à adopter ce qu’elle appelle « l’anti-perfection » et à faire quelques “faux-pas” délibérés. Le carrelage à motifs du salon d’extérieur de la cour centrale, par exemple, enfreint les règles, mais introduit la fantaisie et la fraicheur voulues pour l’esprit du lieu. Julia cite Vico Magistretti, qui a conçu un certain nombre de ses meubles préférés, et dont elle a choisi certains pour la maison : « La simplicité est la chose la plus difficile à obtenir ». C’est un effet plus qu’un ensemble de règles.
Le secret réside toutefois dans les détails, dans la capacité à maintenir une vision claire de la « grande idée » jusque dans les moindres détails. Bien sûr, cette attention minutieuse ne porte ses fruits que si l’idée est convaincante dès le départ. Si c’est le cas, vous êtes en train de créer un monument architectural.
Depuis l’entrée, un escalier permet d’accéder au niveau supérieur. Un autre escalier, plus petit, mène à la cuisine et à la salle à manger légèrement en soupente mettant le bord de l’étang à hauteur d’yeux. Les paniers à côté de l’étang proviennent d’Amatuli. La chaise Louisiana, inspirée d’une selle est une création de Vico Magistretti pour De Padova. Le tapis est de Paco, son motif organique abstrait est à lui seul une œuvre d’art, plus particulièrement lorsqu’il est vu d’en haut. Ses couleurs reprennent les détails du feuillage du jardin vertical et des lianes en cascade. La table Vidun de la salle à manger a également été conçue par Vico Magistretti pour De Padova. Les fauteuils Korium de Tito Agnoli pour Matteo Grassi appartenaient aux parents d’Anthony. Le puits de lumière situé au sommet de l’espace à double volume s’ouvre sur le ciel. Le salon flottant qui se trouve au-dessus est suspendu à un mince cintre en son angle, ce qui confère à l’architecture un caractère aérien et flottant. Le revêtement en granit du mur derrière l’escalier est sablé, tandis que celui de l’escalier est martelé, créant ainsi de subtiles variations de matériaux dans toute la maison, tout en maintenant cohérence et unité.
La cour située de l’autre côté de la chambre principale est l’un des endroits préférés d’Anthony – un espace calme et serein sous les arbres. Les plantes tombent en cascade du niveau supérieur jusqu’au sol, créant un rideau de verdure et une atmosphère presque tropicale, tout en dissimulant habilement les poutres métalliques massives qui permettent à l’architecture d’être légère, ouverte et flottante. La chaise longue Papa et les tables d’appoint Cha Cha sont signées Haldane Martin. La lampe nomade Firefly a été conçue par Alexander Åhnebrink pour De Padova. À l’intérieur, les lambris en bois créent une atmosphère enveloppante et chaleureuse. Le lit a été conçu sur mesure par Julia. Elle l’appelle « l’île du sommeil ». Il est habillé d’une housse en lin brut faite sur mesure par Heavenly Feather. La chambre et la salle de bains s’ouvrent sur leur propre cour intérieure, qui peut elle aussi être ouverte sur la cour principale ou, au contraire, être fermée pour transformer la chambre en une suite privée. Le canapé Yak en cuir d’agneau anisé est deDe Padova. La lampe de table Elementi a été conçue par Elisa Ossino pour De Padova. L’œuvre d’art au-dessus du lit est signée Candice Kramer.
Dans la salle de bains principale, qui peut être ouverte sur une cour entre la chambre et le jardin à l’arrière de la maison, Julia a dessiné les douches en marbre comme si elles avaient été « insérées » dans le volume. Le faux plafond apporte une sensation de cocon. Les détails sont parfaits – il y a des rangements cachés derrière les miroirs par exemple – et il n’y a aucun détail superflu. Le fauteuil Paipaï est de Ligne Rose, tout comme la lampe Globe Indoor. Le portemanteau Estenda a été conçu par Busetti Garuti Redaelli. La gamme de tables d’appoint Sen est signée Kensaku Oshiro pour De Padova. La sculpture sur le socle en bois est une œuvre d’Angus Taylor, représentée par Everard Read. Les serviettes en bambou sur mesure sont de Heavenly Feather.
La suite d’invités à l’étage s’ouvre sur une magnifique salle de bains, qui peut être complètement ouverte sur le ciel grâce à un puits de lumière automatisé contrôlé par une appli. Dans la chambre, la sculpture sur le socle en bois est l’œuvre de Candace Kramer. Le linge de lit sur mesure dans les tons de vert est signé Heavenly Feather et fait écho aux plantes de la salle de bain.
Des escaliers flottants mènent de la cour intérieure à un espace de détente à l’étage, qu’Anthony qualifie de « cabane dans les arbres pour adultes », presque comme un pavillon dans les branches. Le grand foyer en contrebas a été inspiré par la fusion de l’idée de foyer et de pièce. Les balustrades faites de tubes d’acier carrés standard, ont été converties en jardinières avec des plantes grasses, transformant quelque chose de banal en original.
L’espace de détente est meublé d’une table 0-Plat et de chaises Hula d’Haldane Martin. La structure,soigneusement conçu autour des branches d’arbres existants, qui se penchent directement dans l’espace, offre un espace couvert. L’îlot dissimule une cuisine entièrement équipée.
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